![]() |
La zonHum à l'époque de Solis. |
![]() ![]() ![]() |
Extension cybernétique.
Une extension est une machine cybernétique conforme au modèle biomécanique humain. L'aspect du visage et du corps est également humain. L'unité centrale intègre une liaison duplex empathique à courte distance (environ 10 km T) avec un module accordé à un être humain biologique, appelé "étendu(e)". Cette liaison permet à la partie mécanique de profiter du jugement de valeur humain, alors que la partie humaine reçoit les sensations physiques de l'extension. Le système humain-extension a été développé dans l'optique du pilotage spatial.
Sonia "Harpon", l'extension de Kinnock Brennan. L'extension de Brennan, n'est connue que sous le nom de Sonia "Harpon". Le seul texte qui parle d'elle est la première édition (1060, Té-ra, Canif édit.) du journal de Stéfanie Klagget, la discrète maîtresse de Klutter. Voici une partie du texte (non repris dans les nouvelles éditions), dans laquelle Stéfanie Klagget relate sa rencontre avec Brennan et donc avec Harpon. Journal de Stéfanie Klagget (extraits). [...] Ta silhouette se découpait dans le contrejour de la coursive. J'ai couru vers toi. - Capitaine ! L'homme s'est arrêté, ce n'était pas toi. Une autre silhouette le suivait. - Pardon, j'ai cru, je... - Pas grave, tu dois être Stéfanie Klagget. Kinnock Brennan. Corbeau. Il aurait pu être ton frère jumeau, à très peu près. Un petit centimètre de plus en taille, deux ou trois en largeur d'épaules, le nez un peu plus fort, les yeux plus clairs, plus mobiles, la bouche si semblable, c'était une assez surprenante ressemblance. - Mon exten... Ma copilote. Harpon. Elle était encore plus surprenante, aussi grande que lui, décharnée et androgyne, moulée dans une combinaison de vol spatial noire, chaque muscle saillait avec la précision d'une planche anatomique. Si son corps squeletique attirait le regard, son visage le retenait. Des yeux étonnants, vert très clair, des paupières lourdes et épaisses, comme ensommeillées, une bouche et un nez parfaitement ordinaires, des pommettes anguleuses, mais la parfaite symétrie était ce qui retenait le plus l'attention. Aucune expression ne transparaissait. C'était assez effrayant mais je n'étais pas effrayée. Elle m'a tendu la main à son tour, impassible et indéchiffrable. Un sourire parfait et sans âme. Sans âme, c'était exactement cela. - Sonia. Harpon est mon indicatif. Mon aspect vous surprend-il ? - Oui, je l'avoue. Androïde ? Elle savait rire, très en situation. Jusqu'aux yeux. - Extension. Je suis une machine en partie organique, extension de Corbeau par liaison empathique. Je suis son double et il est ma conscience. Vous saisissez ? - Je crois. [...] - Tu peux te brancher avec Sonia, c'est assez intéressant, tu aimeras le faire avec elle. Il faut lancer la liaison un peu avant que tu ne t'endormes. Tes rêves lui donneront beaucoup de clefs et au réveil, tu auras une locataire. Au début, tu seras un peu gênée tellement le contact est étroit. Après, ça s'estompe, et tu es en double. Sonia prend toutes ses décisions non techniques en utilisant ton cerveau, et tu perçois ses sensations physiques, comme si tu les devinais, en fait. Le dialogue est silencieux, il n'y a pas besoin de mots. - Sensations physiques, hein ? - Comme une masturbation, si c'est à cela que tu penses. On l'a tous fait, tous les étendus. Ça peut être assez frustrant mentalement, mais c'est extrêmement satisfaisant physiquement. Tu dois juste activer l'option "sexe". Elle est desactivée en ce moment, j'essaye de m'habituer à la solitude. - Comme Sahad ? Il s'est retourné, son regard était comme une lame. J'ai fermé les yeux. - Corbeau, faites ce que vous avez envie de faire, et ensuite, dites moi ce que je dois... La gifle était très forte, je suis tombée sur le lit, les yeux pleins de larmes, la joue en feu. Il m'a saisi par le col pour me relever, me mettre en face de Sonia. L'extension était impassible, elle me regardait droit dans les yeux. Je me laissais aller, il me secouait doucement. - Ce que tu dois savoir sur l'homme qui t'aime. Regarde les yeux de Harpon. Ce sont des objectifs, des capteurs, des objets. Regarde bien. Sonia avait un vrai regard, ses yeux avaient beau être artificiels, ils étaient animés, attentifs, leur vivacité et leur profondeur ne devaient rien à l'optique. Des yeux humains, d'aspect étrange mais humains. Des éclairs traversaient mes pensées. Miroirs de l'âme... Sens ancien du mot "animé" : doté d'une âme... Avec âme comme amour... Cette machine... Avait une âme. Pas dans son sourire, ni dans son visage, malgré son incroyable qualité expressive, mais dans son regard, dans ses yeux. Une âme artificielle ? Corbeau a parlé d'une voix si basse que j'ai dû tendre l'oreille. - Tu sais ce que sa pute de femme a fait à l'extension de Sahad ? Elle l'a programmée pour s'auto-initialiser en cas d'activité sexuelle. Imagine l'effet que ça peut faire. Je suis sûr qu'il n'a pas pu te baiser la première fois, je me trompe ? J'ai repensé à ta passivité dans la chambre. C'était la trace du traumatisme de ton expérience avec ton extension. - Je me trompe ? - Pas beaucoup. Pardon, Sonia, j'ai honte... - Je vous pardonne. Parce que j'ai vu ce que vous avez fait. Vous lui avez redonné le plaisir de vivre. Elle est encore là-haut, dans le Tarax, presque endormie. Il passe toujours beaucoup de temps près d'elle, dans la cale dix-huit. Elle a les yeux ouverts, elle est vivante. Il lui parle souvent. Il espère que ses mémoires ne sont pas effacées, mais juste... Endormies. J'ai des glandes lacrymales, mais je ne peux pas pleurer. Pourtant je sais ce que c'est que pleurer. - Ferme-la, Harpon. - Oui, taisez-vous, Sonia. Je comprends. Vous avez des sentiments. - J'ai des sentiments. - Vous êtes une machine... - Carbone et hydrogène polymérisés, titane, un peu de fer, comme la chaussure de Deux. C'est ce que vous voulez dire ? - Non, je ne voulais pas vous comparer à la chaussure de Deux. Je voulais juste dire que vous êtes une machine malheureuse. - De la tête aux pieds... Corbeau a mis trois ans pour s'en apercevoir. - Sonia, un jour je serais à bord du Tarax, je vous promets... Elle a baissé la tête, j'ai pris sa main de titane enrobée de peau artificielle. Elle n'était pas aussi chaude qu'une main humaine, mais c'était très facile d'oublier son caractère mécanique. Je l'ai pressée doucement. - Je te promets que j'irais pleurer pour toi devant... - Elle s'appele Canif. Mais laissez-le croire que vous ignorez tout de cette histoire. [...] |