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Le NUAGE de OORT
halo de glace

Le système solaire ne s'arrête pas à l'orbite de Pluton. Le Soleil fait peser son influence gravitationnelle sur des corps 3 000 fois plus éloignés, à mi-chemin des plus proches étoiles.
Là, des comètes en quantité incommensurable tissent leurs orbites autour des corps principaux du Système solaire, formant un gigantesque halo glacé, le nuage de Oort.
Ce nuage est une vaste région frontalière froide, où les températures atteignent à peine quatre kelvins (- 269°C), et où plusieurs dizaines de millions de kilomètres séparent les comètes les unes des autres.
Dans ces régions, le Soleil, bien qu'il reste l'étoile la plus brillante du ciel, n'illumine guère plus que Vénus dans notre ciel nocturne.
(fig. 1)  Image construite d'après une photo du noyau de P/Halley. Un noyau cométaire éclipse le Soleil en "tombant" du nuage de Oort vers les régions internes du Système Solaire.

Aucun astronome n'a jamais "vu" le nuage de Oort, pas plus que les physiciens n'ont vu un électron : on déduit l'existence et les propriétés du nuage de Oort tout comme on détermine les propriétés de l'électron, d'après leurs effets physiques. Dans le cas du nuage de Oort, ces effets sont un train constant de comètes à période longue, qui traversent le système planétaire.

Dans l'Antiquité, on considérait les comètes comme des nuages de gaz luminescents, situés dans la haute atmosphère terrestre (Aristote, IVème siècle avant notre ère). Le philosophe romain Sénèque (Ier siècle) supposa le premier que les comètes étaient des corps célestes qui se déplaçaient sur leurs propres trajectoires dans le firmament.
Cette hypothèse ne sera confirmée qu'en 1577 par l'astronome danois Tycho Brahé, qui compara les observations (sans instruments autres que quadrants, alidades, règles de Jacob, etc) d'une même comète effectuées en plusieurs points de l'Europe. Si la comète avait été très proche de nous, sa position aurait fortement varié par rapport aux étoiles, selon le lieu d'observation. Tycho Brahé ne détecta aucune variation de la position de la comète et il en conclut que la comète se trouvait au-delà de la Lune.

Les applications de la mécanique céleste de Newton, à partir de 1680, ont permis de calculer la distance réelle des comètes et de déterminer leurs orbites. en 1705, l'astronome anglais sir Edmund Halley dressa un premier catalogue de 24 comètes.
Mais comme les observations de l'époque n'étaient pas assez précises, Halley ne put ajuster que des paraboles approximatives à chaque trajectoire de comète. Il remarqua néanmoins que les orbites pouvaient se conformer aux lois de Kepler et tracer des ellipses très allongées autour du Soleil. "Ainsi leur nombre serait limité et, peut-être, pas très élevé. De surcroît, l'espace entre le Soleil et les étoiles fixes est si considérable qu'une comète aurait assez de place pour tourner autour du Soleil, avec une très longue période de révolution."
Cette description de comètes circulant sur des orbites qui s'étendent entre les étoiles anticipait la découverte du nuage de Oort, deux siècles et demi plus tard. Halley observa également que les comètes de 1531,1607 et 1682 avaient des orbites très semblables et des passages espacés d'environ 76 ans. Ces comètes, apparemment différentes, n'étaient-elles pas une seule et même comète qui revenait à intervalles réguliers ?
L'objet en question est effectivement unique, c'est la comète de Halley qui a visité la région des planètes intérieures en 1986.
Depuis l'époque de Halley, les astronomes ont divisé les comètes en deux catégories selon leur période de révolution autour du Soleil (ou, ce qui revient au même, selon leur distance moyenne par rapport au Soleil).
Les comètes à longue période, comme les comètes brillantes récentes Hyakutaké et Hale-Bopp (croquis 2), ont des périodes orbitales supérieures à 200 ans.
(fig. 2) La comète Hale-Bopp, qui passa près de la Terre en mars 1997, est une comète à longue période. Sa visite précédente dans le Système solaire interne date de 4 200 ans. En raison de l'influence gravitationnelle de Jupiter, elle réapparaîtra dans 2 600 ans.
Entre-temps, elle partira jusqu'à 370 fois la distance de la Terre au Soleil. Comme la plupart des comètes à longue période, la comète Hale-Bopp a une orbite très inclinée par rapport à l'orbite terrestre.
Les comètes à courte période sont celles dont les périodes sont inférieures à 200 ans.
Vers 1990, les astronomes ont encore subdivisé les comètes à courte période en deux sous-groupes :
Les comètes joviennes (de la famille de Jupiter), telles que les comètes Encke et Tempel 2, dont les périodes sont inférieures à 20 ans,
Les comètes à période intermédiaire, comme celle de Halley, dont les périodes sont comprises entre 20 et 200 ans.
Ces définitions traduisent de réelles différences : les comètes à longue période et à période intermédiaire arrivent dans la région planétaire aléatoirement de toutes les directions, tandis que les comètes joviennes ont des orbites dont le plan est proche de l'écliptique (le plan de l'orbite terrestre, qui est aussi celui des autres planètes, à quelques degrés près). Les comètes à périodes longue et intermédiaire émaneraient du nuage de Oort, tandis que les comètes joviennes proviendraient de la ceinture de Kuiper, une région de l'écliptique au-delà de l'orbite de Neptune.

Au-delà de Pluton.
Au début du XXème siècle, on connaissait suffisamment d'orbites de comètes à période longue pour en étudier la distribution statistique.
Cette étude mit en relief le fait qu'environ un tiers des orbites "osculatrices" (c'est-à-dire les orbites suivies par les comètes si elles étaient soumises uniquement à l'attraction du Soleil) semblaient hyperboliques. Or, les orbites hyperboliques ne sont pas périodiques, elles viennent de l'espace interstellaire et y repartent, contrairement aux orbites elliptiques, qui sont fermées et périodiques.
Cette observation fit penser à certains astronomes que les comètes provenaient de l'espace interstellaire et étaient influencées et capturées par des rapprochements avec les planètes du Système Solaire.
  Les comètes à longue période sont si faiblement liées au Soleil que les planètes perturbent considérablement leur mouvement. En général, les astronomes ne voient les comètes que lorsqu'elles passent près du Soleil. Lorsqu'ils calculent leur trajectoire, ils ont souvent l'impression que les comètes décrivent une trajectoire hyperbolique, ouverte (a).
Un calcul plus précis, qui tient compte des planètes (en particulier de Jupiter, la planète la plus massive), montre que les orbites sont en réalité elliptiques (b).
L'orbite change de forme à chaque passage dans le Système solaire interne.
Afin de tester cette hypothèse, les astronomes remontèrent le temps. Ils extrapolèrent les orbites des comètes à longue période vers le passé et trouvèrent qu'en raison de l'influence gravitationnelle des planètes les orbites osculatrices n'étaient pas les orbites originelles des comètes. Quand on prend en compte les effets des planètes suffisamment loin dans le passé et en considérant que le foyer des orbites est le centre de gravité du Système solaire (légèrement décalé par rapport au Soleil), presque toutes les orbites deviennent elliptiques. Les comètes "hyperboliques", loin d'être des vagabonds interstellaires, sont liées au Système solaire.
De surcroît, même si l'énergie de deux tiers des orbites semblait distribuée uniformément, l'énergie orbitale d'un tiers des orbites était étroitement concentrée (l'énergie orbitale est inversement proportionnelle au demi grand-axe de l'orbite). Cette accumulation correspond à des orbites qui s'étendent très loin du Soleil, jusqu'à au moins 20 000 unités astronomiques (l'unité astronomique, ou UA, est la distance moyenne de la Terre au Soleil, soit 150 millions de kilomètres environ). Les périodes de ces orbites sont supérieures à un million d'années.
  L'énergie orbitale des comètes à longue période connues révèle le nuage de Oort. Les astronomes calculent d'abord les orbites osculatrices des comètes, c'est-à-dire les orbites qu'elles suivraient si leurs mouvements étaient entièrement déterminés par l'attraction gravitationnelle du Soleil (l'énergie orbitale est inversement proportionnelle au demi grand-axe de l'orbite et s'exprime en inverse de l'unité astronomique, UA-1). Un tiers de ces orbites a une énergie positive, associée à une orbite hyperbolique : les objets correspondants semblent avoir une origine interstellaire (a).

Toutefois, quand on prend en compte l'influence des planètes, on calcule que l'énergie de la plupart des comètes est légèrement négative : les comètes ont une orbite elliptique et elles semblent provenir des confins du Système solaire (b).
Quelques comètes conservent une énergie positive, après ces corrections, mais leur origine interstellaire apparente résulte probablement d'erreurs d'observation. Sous l'action conjointe des planètes et du Soleil, certaines comètes retournent vers le nuage de Oort, d'autres quittent le Système solaire et d'autres encore reviendront visiter le Système solaire interne (c).
Pourquoi tant de comètes provenaient-elles de si loin ? Vers la fin des années 1940, l'astronome hollandais Adrianus van Woerkom montra que la répartition uniforme de leurs orbites s'expliquait par des perturbations planétaires qui dispersent aléatoirement les comètes sur des orbites plus grandes et plus petites. Comment expliquer alors la proportion supérieure de comètes ayant une période voisine de un million d'années ?
En 1950, ce problème intéressa l'astronome hollandais Jan Oort, déjà célèbre pour avoir détecté, 30 ans plus tôt, la rotation de notre Galaxie. Il remarqua que les comètes à longue période sont initialement les comètes de périodes voisines de un million d'années ; elles forment un nuage sphérique, autour du système planétaire, qui s étend à mi-chemin des étoiles les plus proches.
Oort montra que les comètes de ce nuage sont si faiblement liées au Soleil que des étoiles qui passent à proximité modifient aléatoirement leurs orbites. Une dizaine d'étoiles passent à moins de quatre années-lumière du Soleil tous les millions d'années (l'année-lumière est la distance parcourue par la lumière en un an, soit 63 240 unités astronomiques). Ces approches sont suffisantes pour perturber les orbites cométaires, pour modifier aléatoirement leur inclinaison par rapport à l'écliptique et pour envoyer un flot constant de comètes dans le Système solaire interne sur des orbites très elliptiques. En entrant dans le système planétaire pour la première fois, les comètes sont déviées par les planètes, de sorte qu'elles gagnent ou perdent de l'énergie orbitale. Certaines s'échappent du Système solaire, d'autres deviennent des comètes périodiques qui composent la distribution uniforme. Pour Oort, le nuage qui porte aujourd'hui son nom est "un jardin doucement ratissé par les perturbations stellaires".
À l'issue de ses calculs, Oort observa que quelques comètes pouvaient provenir de l'espace interstellaire, mais il supposa que ces exceptions n'en étaient pas réellement : leurs orbites différaient, parce qu'elles étaient connues avec une trop faible précision ou que leur mouvement était perturbé par l'éjection de gaz et de poussières, quand les comètes sont proches du Soleil. Ces forces non gravitationnelles peuvent donner l'impression que les orbites sont hyperboliques, alors qu'elles sont en réalité elliptiques.

Passages dangereux ?
La perspicacité de Oort était remarquable : non seulement ses idées étaient exactes, mais il les obtint alors qu'il ne disposait que de 19 orbites bien mesurées. Aujourd'hui, les astronomes ont 15 fois plus de données. Ils savent que les comètes à longue période qui arrivent dans la région planétaire pour la première fois proviennent d'une distance moyenne de 44 000 unités astronomiques. Ces orbites ont une période moyenne de 3,3 millions d'années.
Les astronomes ont également compris que les perturbations stellaires sont parfois très vigoureuses : certaines étoiles passent si près du Soleil qu'elles traversent le nuage de Oort, perturbant violemment les orbites cométaires. En moyenne, une étoile passe à moins de 10 000 unités astronomiques du Soleil tous les 36 millions d'années, et à moins de 3 000 unités astronomiques tous les 400 millions d'années. Les comètes proches de la trajectoire de l'étoile sont éjectées dans l'espace interstellaire, et les comètes qui restent dans le nuage sont puissamment perturbées.
Bien que les rencontres avec des étoiles n'aient pas d'effets directs sur les planètes (la distance la plus proche entre le Soleil et une étoile, au cours de toute l'histoire du Système solaire, est estimée à 900 unités astronomiques), elles pourraient avoir des conséquences indirectes dévastatrices. En 1981, Jack Hills, du Laboratoire de Los Alamos, a calculé que le passage d'une étoile à proximité du Système solaire aurait pu causer des extinctions d'espèces sur la Terre, en déclenchant une "pluie" de comètes. En 1985, Paul Weissman a reprit ce problème au JPL de Pasadena avec son collègue Piet Hut. Selon leurs simulations numériques, la fréquence des passages cométaires, durant une pluie cométaire, serait 300 fois supérieure à la normale. Les pluies cométaires dureraient deux à trois millions d'années.
Récemment Kenneth Farley et ses collègues de l'Institut de technologie de Californie (Cal Tech) ont retrouvé des indices d'une telle pluie cométaire. En utilisant l'hélium 3 comme traceur de la matière extraterrestre, ils ont analysé l'accumulation de poussières interplanétaires dans les sédiments océaniques au cours du temps. Cette accumulation reflète le nombre de comètes qui traversent la région planétaire, car chaque comète perd de la poussière sur son chemin. On découvre ainsi que la fréquence des passages cométaires s'est brusquement accrue à la fin de l'Éocène, il y a 36 millions d'années, et a diminué lentement pendant deux ou trois millions d'années, conformément aux prédictions des modèles de pluies cométaires. La fin de l'Éocène correspond à une extinction biologique modérée, et plusieurs cratères d'impact ont été datés de cette époque. Les géologues ont également trouvé d'autres traces d'impacts dans les sédiments terrestres, comme des couches d'iridium et des microtectites (des roches terrestres fondues et dispersées par l'impact des comètes).
La Terre est-elle menacée par une averse de comètes ? Apparemment, non. Avec des collègues, Paul Weissman et Piet Hut ont utilisé les positions et les vitesses des étoiles, mesurées par le satellite Hipparcos pour déterminer les trajectoires des étoiles dans le voisinage du Système solaire. Ils ont ainsi calculé qu'une étoile est passée près du Soleil au cours du dernier million d'années. Le prochain passage proche d'une étoile se produira dans 1,4 million d'années, quand la petite étoile Gliese 710 traversera le nuage de Oort, à environ 70 000 unités astronomiques du Soleil. À cette distance, Gliese 710 pourrait augmenter de 50 pour cent la fréquence des passages cométaires dans le Système solaire interne, quelques gouttes de pluie, mais pas une averse.
Toutefois, les passages d'étoiles à proximité du Soleil ne sont pas les seules perturbations du nuage de Oort. D'une part, le nuage est suffisamment grand pour qu'il ressente les forces de marée engendrées par le disque de la Voie Lactée et, dans une moindre mesure, par le bulbe galactique. Ces marées se produisent, parce que le Soleil et une comète du nuage sont à des distances légèrement différentes du plan médian du disque ou du centre galactique. L'attraction gravitationnelle sur ces deux corps diffère donc légèrement, d'où l'effet de marée. Les marées contribuent à alimenter la région planétaire en nouvelles comètes à longue période.
  Des forces de marée déforment le nuage de Oort. Ces forces résultent d'une décroissance de la force de gravitation avec la distance. Le bulbe central de notre Galaxie (une concentration d'étoiles au centre de la structure spirale de la Voie lactée) tire plus sur le côté proche du nuage de Oort (il n'est pas à l'échelle sur ce schéma) que sur le côté éloigné. Le plan galactique exerce une force similaire dans une direction différente. Les marées galactiques sont analogues aux marées océaniques, dues à la Lune, qui attire plus le côté de la Terre le plus proche d'elle que le côté opposé.
D'autre part, des nuages moléculaires géants, dans la Galaxie, peuvent perturber le nuage de Oort. Ces nuages massifs d'hydrogène froid, les lieux de naissance des étoiles et des systèmes planétaires, sont 100 000 fois à un million de fois plus massifs que le Soleil. Lorsque le Système solaire s'approche d'un de ces nuages, les perturbations gravitationnelles arrachent des comètes à leurs orbites et les catapultent dans l'espace interstellaire. Ces rencontres sont peu fréquentes : environ une fois tous les 300 à 500 millions d'années. Au cours de l'histoire du Système solaire, l'effet cumulé des nuages moléculaires est équivalent à l'effet de tous les passages proches d'étoiles.

Plus de questions que de réponses...
Trois grandes questions préoccupent aujourd'hui les astronomes qui étudient le nuage de Oort.
D'abord, quelle est la structure du nuage ? En 1987, Scott Tremaine, à Princeton, Martin Duncan, dans l'Ontario, et Thomas Quinn, à Washington, ont étudié comment des perturbations stellaires et des nuages moléculaires répartissent les comètes dans le nuage de Oort. En raison des perturbations, les comètes périphériques du nuage sont rapidement perdues, soit dans l'espace interstellaire, soit dans le Système Solaire interne. Cependant, un coeur dense de comètes, au plus profond du nuage de Oort, semble alimenter lentement la zone périphérique du nuage.
Les astronomes ont également montré que, lorsque les comètes tombent du nuage de Oort dans le Système solaire interne, leurs inclinaisons orbitales sont conservées. C'est pourquoi les astronomes pensent aujourd'hui que c'est de la ceinture de Kuiper, et non du nuage de Oort, qu'émanent les comètes joviennes de faible inclinaison. Le nuage de Oort, lui, est la source la plus probable de comètes d'inclinaison supérieure et de période intermédiaire, comme celles de Halley et de Swift-Tuttle. Elles furent sans doute jadis des comètes à longue période, que les planètes ont ramenées sur des orbites de période plus courte.
Deuxièmement, combien le nuage de Oort comprend-il de comètes? Les astronomes fondent leurs estimations sur la fréquence à laquelle les comètes s'échappent vers le Système solaire interne. Pour expliquer le nombre observé de comètes à longue période, ils supposent que le nuage contient six mille milliards de comètes, qui sont sans doute les corps célestes les plus nombreux du Système solaire. Seul un sixième de ces comètes est dans le nuage externe, dynamiquement actif, décrit initialement par Oort. Le reste occupe le coeur dense de ce nuage. Ainsi, en estimant la masse moyenne d'une comète à 40 milliards de tonnes, la masse totale de la matière cométaire dans le nuage de Oort serait 40 fois la masse de la Terre.
Troisièmement, d'où viennent les comètes du nuage de Oort ? Elles n'ont pas pu se former là où elles résident aujourd'hui, car, à ces distances, la matière est trop éparse pour se condenser. La capture de comètes par le Soleil n'étant pas un mécanisme très efficace, elles n'ont pu naître dans l'espace interstellaire. Le seul lieu de gestation possible est le système planétaire. Selon Oort, les comètes furent créées dans la ceinture des astéroïdes (entre les orbites de Mars et de Jupiter) et éjectées par les planètes géantes pendant la formation du Système solaire. Toutefois, les comètes sont des corps glacés, comme de grosses boules de neige sale, et la ceinture des astéroïdes était trop chaude pour que des glaces puissent se condenser.
En 1951, un an après la publication de l'article de Oort, Gérard Kuiper proposa que les comètes se condensent plus loin du Soleil, parmi les planètes géantes (la ceinture de Kuiper, située dans le plan de l'écliptique au-delà des planètes géantes, porte son nom, car il suggéra que certaines comètes se forment au-delà des orbites planétaires les plus lointaines).
  L'histoire d'une comète à longue période commence avec sa formation près des planètes et son éjection par les planètes (principe analogue à la "fronde gravitationnelle" utilisée pour la navigation des sondes interplanétaires) sur une orbite plus longue (a).
 
  Là, la comète est soumise aux forces gravitationnelles d'étoiles errantes et de nuages moléculaires géants, ainsi qu'aux forces de marée du disque et du bulbe galactiques. Ces forces inclinent aléatoirement le plan orbital de la comète et allongent progressivement son orbite (b).
 
  À une distance supérieure à 20 000 unités astronomiques (20 000 fois la distance Terre-Soleil), diverses influences extérieures renvoient parfois la comète vers les planètes (c).
 
  Dès que la comète revient dans le Système solaire interne, les planètes peuvent la guider sur une nouvelle orbite, de sorte qu'elle apparaît régulièrement (d).
 
Les comètes naquirent probablement à travers toute la zone des planètes géantes, mais les astronomes supposèrent d'abord que les comètes proches de Jupiter et de Saturne, les deux planètes les plus massives, auraient été éjectées dans l'espace interstellaire, plutôt que dans le nuage de Oort. Uranus et Neptune, moins massives, auraient plus difficilement éjecté des comètes sur des trajectoires d'échappement.
Des études dynamiques plus récentes font douter de cette théorie : Jupiter, et surtout, Saturne envoient une proportion notable de leurs comètes dans le nuage de Oort. Bien que cette proportion soit peut-être inférieure à celle qui a été envoyée par Uranus et par Neptune, elle peut avoir été compensée par la quantité de matière supérieure initialement présente dans les zones des planètes plus massives.
Si les comètes du nuage de Oort ont été formées à des distances variées du Soleil, les températures de leur formation ont différé. Ainsi s'expliquerait en partie la diversité de composition observée parmi les comètes. En effet, des travaux récents ont indiqué que le nuage de Oort contient même des astéroïdes de la région des planètes intérieures. Ces objets, constitués de roches plutôt que de glaces, représenteraient deux à trois pour cent de la population totale du nuage de Oort.
Ces idées sont toutes fondées sur la présence des planètes géantes, qui catapultent les comètes vers l'extérieur et modifient leurs orbites lorsqu'elles reviennent dans la région planétaire. Si d'autres étoiles possèdent des planètes géantes, comme le suggèrent les observations de ces dernières années, elles ont peut-être également des nuages de Oort. Si ces étoiles et leur cortège de comètes passent près du Soleil, les nuages pourraient s'interpénétrer. Même ainsi, les collisions entre comètes seront rares, parce que la distance moyenne entre comètes est d'au moins une unité astronomique.
Les nuages de Oort autour des étoiles autres que le Soleil laissent peut-être échapper des comètes dans le milieu interstellaire. Des comètes interstellaires qui passeraient près du Soleil seraient facilement reconnaissables en raison de leur vitesse bien supérieure à celle des comètes de notre nuage de Oort. Aucune comète interstellaire de ce type n'a encore été détectée, mais ce n'est guère surprenant : le Système solaire est une cible minuscule dans l'immensité de l'espace interstellaire, et la probabilité qu'une comète interstellaire soit passée dans le Système solaire interne au cours des derniers siècles est au mieux de un demi.

Le nuage de Oort continue à fasciner les astronomes. Grâce à la mécanique céleste, la nature a préservé dans ce lointain réservoir un échantillon du matériau qui a formé le Système solaire. En étudiant la dynamique de ce réservoir et la composition chimique des comètes qui en sortent, les astronomes comprennent mieux l'origine du Système solaire.
Plusieurs missions spatiales d'étude des comètes sont en préparation. Leurs cibles seront les comètes Wild 2, Tempel 1, Wirtanen et quelques autres.

Le 21ème siècle ne sera peut-être pas le siècle des comètes, mais il commencera avec l'étude des comètes.
Corrélats :
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